Tiers Livre
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Le Tiers Livre des faicts et dicts héroïques du noble Pantagruel, composés par M. François Rabelais, docteur en médecine est une œuvre de François Rabelais parue en 1546.
Le Tiers Livre est jugé obscène et censuré par la Sorbonne, à l’égal de Pantagruel et de Gargantua. Pourtant, il sera protégé et publié en 1546.
L’ouvrage se donne comme une œuvre humaniste à l’adresse des gens « studieux et savants ». L’abondance des citations latines notamment et des références, suffit à confirmer ce caractère. C’est aussi un livre comique. Il laisse place à l’humour, à l’esprit et au rire de l’âme.
Il se fait l’écho des débats médicaux, juridiques, moraux et religieux de son temps, en s’interrogeant sur la question du mariage, à travers le personnage de Panurge.
Rabelais raconte les faits et gestes de deux géants, Pantagruel et Gargantua, depuis leur naissance jusqu'à leur maturité. Ce ne sont pas des ogres cruels, mais des géants débonnaires et gloutons. Au fil des aventures la taille des géants peut varier; ils restent des géants pour les épisodes comiques et l'épopée mais retrouvent taille humaine pour les parties philosophiques. Au fur et à mesure que l'on avance dans le roman la différence de taille avec les autres personnages tend à disparaitre.
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Le gigantisme de ses personnages permet à Rabelais de décrire des scènes de festins burlesques. L'infinie goinfrerie des géants ouvre la porte à de nombreux épisodes comiques. Ainsi, le premier cri de Gargantua à sa naissance est : « À boire ! À boire ! ». Le recours aux géants permet aussi de bouleverser la perception habituelle de la réalité. Sous ces aspects, l'œuvre de Rabelais s'inscrit dans le style grotesque, qui appartient à la culture populaire et carnavalesque.
Néanmoins, le thème du géant n'est pas exploité uniquement pour son comique. Il symbolise l'idéal humain de la Renaissance : il est la transposition physique de l'immense appétit intellectuel de l'homme de la Renaissance. Rabelais s'efforce ainsi, à travers ses textes, de concilier culture savante et tradition populaire.
Face à cette oscillation entre fantaisie débridée et symbolisme intellectuel, comment comprendre l'œuvre de Rabelais ? Ses intentions restent assez énigmatiques. Dans l'avis au lecteur du Gargantua, il dit vouloir avant tout faire rire. Puis, dans le Prologue, par une comparaison aux silènes et à Socrate, il suggère qu'une intention sérieuse et un sens profond se cachent sous l'aspect grotesque et fantaisiste. Mais dans la seconde moitié du prologue, il critique les commentateurs qui cherchent des sens cachés dans les œuvres. Manifestement, Rabelais aime laisser planer l'ambiguïté et perturber son lecteur.
Différents types d'humour parsèment l'œuvre de Rabelais, mais il le pratiquait également dans sa vie. Un jour que sans argent, il se trouvait à Lyon et souhaitait se rendre à Paris, il laissa en évidence plusieurs sachets de sucre qu'il intitula : « Poison pour le roi ». Il est arrêté et conduit à Paris par des gens d'armes. Le roi François Ier en rit tellement dit-on qu'il paya la note sans discuter, ce qui est à l'origine de l'expression : « le quart d'heure de Rabelais », désignant le moment délicat de régler une dette alors que l'on se trouve sans argent.
Il est aussi considéré comme le créateur de la contrepèterie, les deux exemples les plus anciens provenant de Pantagruel : « la femme folle à la messe » et « à Beaumont-le-Vicomte ».
Rabelais invente le thélémisme dans son Gargantua. Cette philosophie aux accents libertaires se résume au précepte Fay ce que voudras, la seule règle de l'Abbaye de Thélème[10]. Dans les faits, Rabelais a repris une sentence d'Augustin d'Hippone, lequel s'exclamait « Aime et fais ce que tu voudras »[11], et a détourné le sens de ces propos.
En définitive, le « Fais ce que voudras » peut devenir la plus sévère des règles, dès l’instant qu'un esprit scrupuleux et exigeant pour lui-même s’impose un art de vivre d’autant plus fidèlement respecté qu’aucune force extérieure ou surnaturelle ne le lui a dicté.
La morale de Rabelais se résume tout entière dans le principe de Thélème : Fais ce que voudras. Puisque la nature est bonne, aucune manifestation de la nature ne saurait être mauvaise (du moins « chez gens libérés, bien nés, bien instruits, conversant en compagnies honnêtes » ) : la nature veut toujours ce qui doit être, quand elle n’est ni déviée ni comprimée. Le pantagruélisme consistera donc à débrider toutes les forces de l’être et à les satisfaire aussi complètement que possible.
Le mal est ce qui contrarie et mutile la nature : la morale religieuse, l'ascétisme catholique, le rigorisme huguenot, le jeûne, la claustration, toutes inventions diaboliques de la hideuse Antiphysie, voilà les choses qui excitent le mépris ou l’indignation de Rabelais. Par contre, l'égoïsme qu’il lâche en liberté est à peu près inoffensif, parce qu’il s’offre dans sa simplicité primitive et naturelle sans se compliquer d’ambition ni d’intérêt.
Il faut donc voir dans les règles morales que les thélémites s’imposent librement eux-mêmes une profession de foi humaniste et la solennelle proclamation de l’idéal humain de la Renaissance.
La religion de Rabelais
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La personnalité de Rabelais cristallise un débat entre historiens sur la question de l'incroyance au XVIe siècle. Abel Lefranc, auteur de la première édition critique de Rabelais au XXe siècle, soutient ainsi dans une série d'articles introductifs (1912–1930) la thèse de l'athéisme de son auteur. Il s'appuie sur des extraits de son œuvre (en particulier la lettre de Gargantua à Pantagruel) et les accusations portées contre lui par Calvin (Des scandales, 1550) et par Robert Estienne (préface de l'évangile selon Matthieu, 1553).
La thèse inverse est soutenue en 1924 par le théologien catholique Étienne Gilson[12], et surtout par l'historien des Annales Lucien Febvre dans Le problème de l’incroyance au XVIe siècle, la religion de Rabelais (1942). Pour ce dernier, les accusations d'athéisme portées à l'encontre de Rabelais ne doivent pas être interprétées à la lumière du rationalisme moderne, mais replacées dans le contexte de l'époque. En effet, était considérée comme athée toute personne qui ne se conformait pas à la religion dominante, ou du moins à la religion de son accusateur. Ce débat, portant initialement sur l'analyse de l'œuvre de Rabelais, ouvre ainsi la voie à une réflexion plus générale sur les représentations mentales de l'époque.
"Rabelais [...] était pétri de philosophie et de théologie franciscaines" (M.-L. Demonet, "Traits et ombres scotistes à l'époque de Rabelais", p. 32). Il désigne l'ordre franciscain (mais aussi les moines sans culture) sous le nom de "farfadets" (Tiers Livre, chap. 10; Quart Livre, ch. 47.)
Postérité
Honoré de Balzac s'est inspiré de l'œuvre de Rabelais et de son langage pour écrire Les Cent Contes drolatiques. Il ne cesse de lui rendre hommage en le citant dans plus de vingt romans et nouvelles de La Comédie humaine. « Balzac est à l'évidence un fils ou un petit fils de Rabelais (..)Il n'a jamais caché son admiration pour l'auteur de Gargantua qu'il cite dans Le Cousin Pons comme « le plus grand esprit de l'humanité moderne ».[13],[14] ».
Balzac va même jusqu'à emprunter le nom d'un personnage de Rabelais, (Alcofribas) pour signer la nouvelle Zéro, conte fantastique dans le journal La Silhouette du 3 octobre 1830.
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Rabelais a laissé à Montpellier une véritable tradition : pas un médecin ne quitte la Faculté de médecine sans avoir prêté serment sous la « robe de Rabelais ». De même dans les traditions estudiantines telles que la faluche, l'hommage à Rabelais est toujours présent.
Aujourd'hui, c'est sous l'ombre d'un micocoulier qu'il se prélasse. Le Jardin des Plantes de Montpellier l'a immortalisé, sa statue veillant sur les centaines d'espèces du domaine.
Œuvres principales
- Pantagruel (Les horribles et épouvantables faits et prouesses du très renommé Pantagruel Roi des Dipsodes, fils du Grand Géant Gargantua. ) (1532)
- Gargantua (La vie très horrifique du grand Gargantua, père de Pantagruel, fils de Grandgousier) (1534)
- Le Tiers Livre (1546)
- Le Quart Livre (1552)
- Le Cinquième et dernier livre des faits et dits héroïques du bon Pantagruel (1564, posthume ; sa paternité n'est plus mise en doute depuis l'édition de la Pleiade, dirigée par Mireille Huchon en 1994)
- Traité de bon usage de vin
- Pantagrueline Prognostication et autres almanachs
- Œuvres... Nouvelle édition où l'on a ajouté des remarques historiques et critiques sur tout l'ouvrage. Amsterdam, Bordesius, 1711. 6 tomes en 5 volumes. C'est la première édition critique et commentée de Rabelais ; elle a été publiée par Le Duchat avec la collaboration de La Monnoye.
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